L’importance de la lumière et la lumière publique
13 décembre 2016
Gilles Arpin
On a tous une connaissance sensible de la lumière. Cette connaissance est plus ressentie qu’étudiée sans doute mais personne ne s’accommode d’une lumière trop intense et tous nous souffrons de son insuffisance le cas échéant.
Je maintiens depuis longtemps que la lumière (ou son absence) est un matériau d’aménagement dont la particularité est de révéler l’aménagement ou de le soustraire à la vue, ce qui génère les ambiances.
La volonté des gens d’occuper l’espace nocturne des villes et villages existe depuis longtemps et la lumière est un marqueur social de l’activité nocturne. Revoyez les images de la rue Sainte-Catherine des années 50 bondée d’enseignes lumineuses et vous remarquerez que nous n’inventons rien. Nos moyens se raffinent et notre réflexion doit accompagner la croissance de la vie nocturne voilà tout.
À travers différents plans lumière, des investissements ont été consentis depuis 25 ans dans des pôles d’activités touristiques patrimoniales, de grands espaces de promenade ou de divertissement pour y créer des ambiances adaptées. Je doute que beaucoup se souviennent de l’ambiance du vieux-Montréal avant 1992 ou du quartier des spectacles jusqu’à récemment. En retour la mise en lumière d’espaces publics favorise la fréquentation et tend à faire augmenter la demande des citoyens pour la création d’ambiances nocturnes diversifiées.
L’approche par plan lumière permet d’établir le plan directeur d’une intervention pouvant s’échelonner sur plusieurs années. Il permet d’établir la hiérarchie de la composition (l’image nocturne finale) , de planifier les interventions pour les jumeler à des travaux d’infrastructures ou à des stratégies de développement commercial, résidentiel ou institutionnel.
Le développement des technologies, particulièrement au chapitre de la longévité des sources (15 à 20 ans), de leur faible coût d’entretien et de leur frugalité énergétique permet aujourd’hui de considérer la lumière comme un investissement et non comme une dépense.
La discipline de conception lumière prend ses marques. De plus en plus les appels d’offres professionnelles pour de petits et de grands chantiers exigent la présence d’un concepteur lumière parmi les experts.
Bien que la technologie permette d’intégrer la couleur, la programmation d’effets ou la projection d’images leur usage doit concourir à assurer le confort visuel des usagers et des résidents et à enrichir leur environnement nocturne. Les ambiances même «trash» doivent être harmonieuses c’est-à-dire répondre aux objectifs du mandat en s’intégrant au contexte.
Dans cette perspective l’expérience et le savoir-faire d’un professionnel de la lumière, observateur de la vie nocturne peut contribuer à ce que j’appelle right lighting : procurer une ambiance qui assure la viabilité des fonctions et le confort visuel des usagers, qui favorise la fréquentation et enrichi l’espace public nocturne d’expériences ou de tableaux.
Gilles Arpin est concepteur lumière. Il possède 30 ans d’expérience dans le domaine scénique en tant que technicien, éclairagiste, directeur technique, directeur de production et producteur délégué pour diverses productions de Ballet, d’Opéra ou de Musical. Depuis 1996 il s’intéresse au domaine de l’aménagement lumière de lieux publics institutionnels, résidentiels ou commerciaux et a fondé la firme Éclairage Public. Plusieurs de ses projets se sont mérités des prix et des mentions.