Apprivoiser les changements industriels

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18 janvier 2017

Keith Sones

En 1986, après avoir passé quelques années à l’université et avoir occupé divers emplois en construction, j’ai reçu un appel téléphonique d’une entreprise auprès de laquelle j’avais postulé pour un poste. Le directeur des ressources humaines m’a alors informé que j’avais été sélectionné parmi un certain nombre de candidats pour ce qui était, à cette période de ma vie, l’emploi de mes rêves. J’étais fou de joie! Des visions de richesses ont traversé mon esprit comme une publicité de loterie télévisée et je croyais que mon avenir était assuré. Plus d’inquiétudes face au paiement des factures, je partirais chaque année en vacances dans des pays exotiques et j’aurais la sécurité d’emploi qui ferait l’envie des professeurs. Bref, je m’apprêtais à vivre à l’aise. La vie était magnifique.

Oh, je sais ce que vous pensez. Il a été vraiment chanceux et a obtenu un poste dans une firme d’ingénierie prestigieuse ou peut-être un de poste de cadre. Et bien non. Mon rêve m’avait envoyé dans une toute autre direction. J’étais sur le point de devenir employé d’usine.

Quoi? C’est ce que vous vous dites n’est-ce pas? C’était ton emploi de rêve? Oh, ce doit être un poste de supervision consistant à surveiller les opérations de l’usine. Ou un poste de stagiaire qui te mènera à une fabuleuse carrière de gestion.

Vous avez de nouveau tort. J’allais poinçonner ma carte de temps chaque matin, ramasser un ensemble de clés et installer les marches d’un réservoir de carburant sur les gros camions routiers. Plusieurs fois par jour, encore et encore. Pendant des jours, des semaines et espérons-le, des années.

D’accord, vous êtes maintenant véritablement confus et c’est compréhensible. Vous vous demandez sûrement pourquoi j’étais si heureux d’avoir obtenu un emploi sur une chaîne de montage. Donc, pour vous aider à mieux comprendre mon point de vue, il est important de comprendre le contexte. En 1986, nous sortions d’une récession qui avait duré cinq ans. Les taux hypothécaires oscillaient autour de 11 % et étaient inférieurs à ce qu’ils avaient été quelques années auparavant. Les bons emplois étaient rares et il était difficile pour plusieurs personnes, y compris moi, de joindre les deux bouts. Après avoir traversé des périodes difficiles financièrement, être embauché dans une usine où plusieurs personnes y travaillaient depuis des années à de bons salaires était inaccessible pour moi.

Les choses se sont bien passées à l’usine pendant les premières années. J’ai eu la chance de travailler avec plusieurs personnes vraiment géniales, j’ai gagné ma vie décemment et j’ai acquis des compétences qui me serviraient pour les années à venir. La vie était aussi bonne que je l’espérais.

J’ai donc décidé de mettre fin à tout ça.

Pourquoi? Tout allait si bien et j’étais à l’abri des nombreux défis financiers que certains de mes amis éprouvaient toujours, pourquoi jeter tout cela à la poubelle et choisir une vie pleine de risques et d’incertitudes? Cette partie était facile, du moins dans mon esprit. La réponse? Le contexte avait changé, comme cela arrive fréquemment.

Selon ma vision du monde, la société commerciale s’était engagée sur la voie du regroupement d’entreprises. Je me rendais compte que les entreprises fusionnaient, acquéraient et se métamorphosaient depuis l’existence des empires commerciaux, mais on aurait dit qu’une accélération de ce phénomène était en cours. Des rumeurs, des articles de journaux et d’autres sources informelles ont commencé à indiquer que l’usine où je travaillais pourrait changer dans un avenir pas si lointain. J’ai donc fait des plans pour retourner à l’école et étudier à nouveau en vue d’une autre carrière.

Mes collègues au travail étaient moins convaincus des changements potentiels à venir. Il y en a un en particulier qui a déclaré : « Les emplois payants n’existent plus. Si vous partez ici, vous y perdrez au change. Nous serons bien. ». J’avoue que j’étais nerveux, mais j’étais passionné par mes choix pour l’avenir.

Je suis parti étudier et quelques années plus tard, l’usine a effectivement fermé ses portes. Mes anciens confrères de travail se sont retrouvés sans emploi dans un marché difficile et, encore aujourd’hui, je me sens mal pour ce qui est arrivé. Ce sont de bonnes personnes qui ont été aux prises avec des circonstances hors de leur contrôle.

Trop souvent, nous évaluons l’avenir de deux façons. Soit nous ferons (ou accepterons) des changements dans nos vies, soit nous choisirons le statu quo. Ce que nous oublions fréquemment lorsque nous faisons ce choix, c’est que le statu quo est simplement un instantané du temps au sein d’un environnement dynamique. Les choses changent constamment autour de nous, mais nous nous isolons en pensant que les choses que nous aimons ou avec lesquelles nous sommes familiers resteront les mêmes pour toujours. Bien que ce soit une pensée plutôt réconfortante à certains moments, elle est également obstinément fausse dans la grande majorité des cas.

Dans le secteur de l’électricité, les changements se font lentement, mais se font inévitablement. Pour ceux d’entre vous qui ont amorcé leur carrière avant l’arrivée des ordinateurs, les systèmes SCADA exigeaient qu’une personne vérifie les cadrans électromécaniques et les tableaux connexes sur une base régulière. Les données en temps réel qui nous sont si chères, n’existaient même pas en rêve il y a à peine quelques décennies. Et pourtant nous y sommes, fonctionnant dans un monde bien différent. Les tubes à vide ont été remplacés par des transistors. Les services publics utilisent la localisation automatique pour déterminer un problème de ligne de transmission avec une précision de quelques mètres. Les ordinateurs parlent à d’autres ordinateurs et nous pouvons donc tous maintenir des niveaux de fiabilité élevés.

Donc, les choses changent. Nous partageons tous un certain degré de résistance à ces changements dans notre paysage. À travers l’histoire, ceux qui ont accepté le changement dès le début du processus, l’ont décrit de diverses façons qui ressemblent à ce qui suit :

  • Étape 1 : Réflexion par rapport au changement (invention, prédiction, etc.). Vu comme excentrique. Les collègues et les concurrents n’y prêtent pas beaucoup d’attention.
  • Étape 2 : On s’amuse ouvertement de votre idée. Vous êtes considéré(e) comme un hurluberlu ou un fou. Les collègues et les concurrents s’en moquent.
  • Étape 3 : Recueil d’informations ou construction de prototypes pour soutenir l’idée. Les collègues et concurrents affirment que « ça ne fonctionnera jamais ».
  • Étape 4 : Recueil de preuves suffisantes ou construction d’un modèle de travail efficace. Les collègues et les concurrents supposent que c’est dangereux, trop coûteux pour une production de masse ou un succès exceptionnel.
  • Étape 5 : D’autres personnes s’intéressent à votre idée ou produit. Les collègues et les concurrents défendent vigoureusement le statu quo (indice – vous entendez la phrase « c’est comme ça que nous le faisons ici »).
  • Étape 6 : Démonstration d’un succès continu et répétitif. Les collègues participent au succès et les concurrents se retrouvent dans un musée.

Finalement, ce changement d’état se produit en ce moment. Où et à quoi? Je vous laisse y réfléchir, mais regardez les panneaux de signalisation le long de la route. Est-ce que la technologie fonctionne ailleurs dans le monde, mais n’a pas encore été adoptée où vous vivez? Les revenus sont-ils stables ou en baisse alors que l’approvisionnement en électricité et la fiabilité demeurent une exigence sociale? L’automatisation change-t-elle notre façon de voir le monde?

Le changement est parfois effrayant, mais il a également mené à toutes les innovations dont nous profitons. Pensez à votre monde et posez-vous la question : « Vais-je lutter contre les changements inévitables ou les accepter? Et que se passera-t-il lorsque je le ferai? » Parce chose certaine, c’est que la vie ne sera pas ce qu’elle est aujourd’hui.

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