Faire une différence – Avoir un impact

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lme39_f_2_sones_400.jpgPar Keith Sones

L’une des choses les plus ironiques de la vie c’est que les événements qui nous forment, qui nous rendent plus forts que nous ne le serions devenus autrement et qui nous définissent en tant qu’adultes sont bien souvent les mauvaises choses. C’est du moins ce qu’il nous semble lorsque cela nous arrive. Comme enfant, vous avez peut-être eu de la difficulté à gérer le divorce de vos parents, puis vous vous êtes rendu compte que c’était pour le mieux et vous avez appris à vous assurer que vos relations soient saines. 

Une longue maladie peut vous avoir isolé de vos camarades de classe, mais vous avez alors découvert votre capacité à être bien avec vous-même. La pauvreté des enfants, qui est toujours difficile pour n’importe qui, a peut-être été la source de votre éthique de travail et ce pourquoi vous tenez à ce que votre jeune famille soit en sécurité et à l’abri financièrement. Ce sont généralement nos expériences qui nous façonnent pour devenir les personnes que nous sommes.

Au cours de mon enfance et de mon adolescence, mes parents travaillaient dans le système scolaire public. Mon père enseignant et ma mère bibliothécaire m’ont fortement encouragé à bien étudier, à réussir à l’école et à en faire ma priorité absolue. Notre maison était pleine de livres qui offraient une merveilleuse fenêtre sur le monde et, d’aussi loin que je me souvienne, il n’y avait pas de plus grand honneur chez nous que d’être un génie universitaire.

J’ai donc travaillé et, même si certains sujets ne venaient pas aussi facilement que d’autres, les résultats ont rendu mes parents fiers. Je me suis retrouvé premier de classe à l’école primaire et je n’ai manqué aucun jour de classe pendant les sept premières années de l’école primaire. Comme on peut s’y attendre, les enseignants ont transmis un message du genre « prenez exemple sur Keith » au reste de mes camarades de classe. J’étais le classique animal de compagnie du professeur. Venant d’un environnement où ce statut était valorisé, j’ai rayonné. Mais il y avait des nuages noirs à l’horizon et les problèmes s’en venaient.

La fin de l’école primaire a inévitablement mené à l’entrée au collège qui était pour moi un monde inconnu. Les enfants de tout le quartier envahissaient les corridors, fumer et boire devenaient monnaie courante, la révolte des adolescents battait son plein et l’espace sécuritaire que j’avais connu l’année précédente s’est évaporé aussi vite que le sourire sur mon visage. Bien que je n’étais pas tout à fait désemparé (certaines histoires s’étant produites au lycée avaient bien sûr circulé par le passé), je n’étais définitivement pas préparé à cette nouvelle réalité effrayante.

L’une des premières leçons que j’ai apprises c’est que les réputations, comme les vieilles habitudes, s’effacent difficilement. Le gamin ringard et naïf qui avait été mis publiquement sur un piédestal par les enseignants, constituait une excellente cible pour les intimidateurs qui semblaient opérer en toute impunité dans les couloirs et la cour d’école. Ce genre d’enfant était également un ami risqué, puisque personne ne voulait porter le sceau « coupable par association » et assumer la colère des bourreaux eux-mêmes. Le petit groupe d’amis que j’avais eu dès l’école primaire a été englouti par cette version nord-canadienne du Seigneur des mouches, succombant à la pression des pairs et s’aventurant dans de nouveaux groupes de comparses. Je me sentais très seul.

Au début, j’étais plutôt victime de violence verbale et de menaces qu’autre chose. Une matinée typique comprenait une série de railleries et de chahuts à propos de mon apparence, de mon statut social, de mes faibles prouesses athlétiques et de tout ce qui pouvait être insulté. Cette dérision attirait toujours le rire des étudiants qui traînaient près des casiers et s’entassaient dans les corridors, quelques-uns se joignant invariablement au « plaisir » à l’aide de leurs propres coups de fouet verbal. Après avoir vu ce qui s’était produit lorsque d’autres enfants dans ma situation avaient défié les agresseurs en leur répondant, j’ai vite appris à m’en aller, les oreilles rouges et recouvert de honte comme s’il s’agissait d’une cape médiévale.

Quand l’assaut quotidien n’avait pas suffisamment d’effet, j’embrassais d’abord le sol sur lequel mes oppresseurs marchaient, les injures se commuaient en poussée dans la salle de classe et en claque sur la tête lorsque personne en autorité ne regardait. Même lorsqu’un enseignant ou un directeur était témoin de ce comportement, cela n’avait qu’un impact négatif. Le bref commentaire « hé, ça suffit » du superviseur semblait seulement contrarier le tyran qui me reprochait de lui avoir attiré des ennuis. La vie à l’école était devenue à peine tolérable. Puis, cela a empiré.

Notre maison était à quelques pâtés de maisons de l’école, ce qui me laissait à découvert sur le chemin du retour. J’avais déjà compris que le fait de me présenter à l’école bien avant la première cloche m’accordait un peu de répit car les brutes semblaient être des lève-tard, mais après l’école, ils attendaient que je sorte de la cour d’école. Peu importe à quelle heure je partais. La poussée et la gifle habituelles que j’avais supportées à l’école semblaient être l’entrée, tandis que les coups de pied, les coups de poing et les coups assénés en groupe constituaient le plat principal. Roulé en boule sur le sol gelé et battu pendant que ces gars riaient, il me semblait me trouver dans les profondeurs de l’enfer.

L’abus s’est poursuivi pendant près de deux ans avec les vacances scolaires et les fins de semaine pour seule consolation. En neuvième année, terrifié et seul et me sentant incapable d’en parler à qui que ce soit, j’ai cessé d’aller à l’école. J’avais juste trop peur. Mon absentéisme s’est poursuivi jusqu’à ce qu’un conseiller scolaire parle à ma mère et lui demande où je me trouvais, croyant probablement que j’étais malade. Abasourdis, mes parents m’ont confronté et je me suis ouvert, décrivant tout et pleurant comme un bébé. Mes émotions tourbillonnaient : la veille, je ne savais pas si j’avais le courage de continuer à vivre et maintenant, c’était un mélange de rage, de peur, de trahison, de perte et d’espoir.

Dans la vie, il y a parfois une personne qui prend position pour aider quelqu’un dans le besoin. Même lorsqu’il est difficile de le faire. Le conseiller scolaire a décidé qu’en dépit de l’environnement scolaire difficile, il n’abandonnerait pas jusqu’à ce que je sois en sécurité. À ce jour, je ne connais pas toutes les mesures qui ont été prises, mais le protagoniste principal a fini par être expulsé et a fait face à des accusations criminelles devant le Tribunal de la Jeunesse. L’un de mes rares amis s’était retrouvé à l’hôpital, sévèrement battu. La même année, deux autres ont été moins chanceux en s’enlevant la vie lorsqu’ils ont apparemment senti que la vie était trop sombre. Ma situation s’est améliorée, mais on ne peut pas vivre sous la protection des autres pour toujours. Ma plus grande crainte était de savoir comment j’allais survivre si j’étais soumis à la même chose ailleurs. Une nouvelle école, un nouveau quartier, la piscine. Partout.

L’été avant mon inscription à la dixième année, quelque chose de remarquable est arrivé. J’ai grandi. Beaucoup. J’étais sur le point d’entrer dans une nouvelle école et ma nouvelle taille (je mesurais maintenant 6 pi 1 po) a attiré l’attention de l’entraîneur de basketball à l’école et celui-ci m’a suggéré de me présenter aux essais. Moi. Jouer au basketball. Il s’était clairement trompé de gars, mais je suis allé, surtout pour voir si je me réveillerais lorsque quelqu’un me pincerait.

Et maintenant, la coïncidence, une de ces choses qui a un énorme impact sur votre vie, mais que vous ignorez à ce moment-là. Avec la poussée de croissance, mes épaules ont commencé à s’élargir, comme si mes ailes se déployaient. Non, ce n’est pas une coïncidence, juste un facteur qui influence le résultat. Nous y voilà.

Je fouillais dans mon casier dans le corridor de la nouvelle école, me préparant à rendre visite à l’entraîneur de basketball. En entendant des pas, j’ai levé les yeux et j’ai vu arriver un des gars qui avaient pris plaisir à rendre ma vie complètement misérable pendant des années. Honnêtement, je ne peux pas décrire ce que j’ai ressenti, alors disons que c’était intense. Reconnaissant l’une de ses anciennes victimes, il s’est avancé en ligne droite dans ma direction et ce faisant, les vieux sentiments de peur ont inondé mon esprit, brouillant ma vision. Il était difficile de le voir se rapprocher, mais le bruit des pas me disait que l’écart se rétrécissait.

Il était à moins d’un pied de moi, sur le point d’exercer son ancien métier de brute quand mon esprit s’est éclairci plus vite que Beckham ne peut marquer un but dans le coin supérieur du filet. Une pensée très nette a traversé mon esprit. Un plan intentionnel très concret et réel. Vous voulez savoir ce que c’était?

Vous voulez vraiment savoir?

Vraiment?

D’accord, c’était un éclair de génie de ma part.

« Qu’est-ce que j’ai à perdre? ».

Je me suis déplacé beaucoup plus vite qu’il ne l’aurait pensé. Mes mains se sont enroulées comme un étau autour de son cou, mon nouveau corps a soulevé son poids étonnamment facilement et tournant avec la concentration délibérée d’un patineur artistique. Ses pieds à quelques centimètres du sol, je l’ai projeté dans le casier et j’ai regardé droit dans ses yeux effrayés. « Laisse-moi tranquille et ne m’embête plus jamais ». Ce n’est pas la réplique la plus shakespearienne que je puisse imaginer, mais le point venait d’être fait. Il s’est effondré, a marmonné quelque chose qui ressemblait à des excuses et s’est éloigné.

C’était fini. Des années de terreur, d’indécision, de confiance écrasée et de perte d’espoir, emportées en un instant. Ils disent que les grands changements dans la vie se produisent en quelques secondes. C’est vrai.

Ce qui est arrivé après ce jour fatidique? J’ai fait partie de l’équipe de basketball, de l’équipe étoile provinciale, la confiance académique est revenue, j’ai voyagé, j’ai rencontré la meilleure femme au monde (sans vouloir offenser les autres merveilleuses femmes, ce n’est que mon opinion personnelle), je me suis lancé dans une carrière enrichissante et je côtoie maintenant de fantastiques collègues dans l’industrie.

Juste comme ça.

Donc, pourquoi est-ce que j’écris cette histoire très personnelle dans un magazine technique? En fait, les parallèles sont frappants et forts. Nous travaillons dans l’industrie de l’électricité et de l’électronique qui a avancé à pas d’escargot pendant des années. Ensuite, les besoins pour les services que nous offrons ont explosé. Les ordinateurs contrôlent nos vies, les effets des anciennes technologies sont clairs sur le plan climatique, les énergies renouvelables existent et sont très prometteuses, les microréseaux sont construits et les prix de l’électricité augmentent plus vite que les gens ne peuvent se le permettre. Tout cela pendant que plusieurs de nos contemporains prennent leur retraite emportant avec eux leurs vastes connaissances.

Mais les réponses à nos problèmes et dilemmes sont ici, sous nos doigts. En vous, vos confrères de travail, votre collègue et oui, même vos compétiteurs. Que vous les trouviez à l’issue d’une vie de recherches et d’expériences ou à 3 heures du matin hier quand vous avez connu ce moment de nirvana lors du séminaire de la semaine dernière. Il n’y a pas de « ils » à la rescousse, montés sur des chevaux blancs du futur. Mais nous n’avons pas besoin d’eux, puisque nous nous avons.

Nous vivons tous dans un monde commercial, nous travaillons dur pour gagner de l’argent et faire avancer nos carrières. Et c’est très bien. Mais quand cette opportunité se présente, celle où vous pouvez faire une réelle différence parce que vous êtes qui vous êtes et ce que vous savez, faites-le. Faites-le tout simplement. Partagez vos connaissances, aidez un client, rendez notre industrie plus sécuritaire, répondez à une question, débattez d’un point et faites avancer les choses. Pas toujours pour avoir raison, mais parce que c’est ce qu’il faut faire.

Parce que l’impact que vous pouvez avoir peut être énorme.

Je le sais.

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